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Les ECHOS du CIREF
23 juillet 2014

ENJEUX DE L'HISTOIRE ET DE LA CULTURE NOIRES DANS LE PROCESSUS ACTUEL DE DEMOCRATISATION DES ETATS DE L'AFRIQUE MODERNE

 

Essai sur la résolution de l'énigme de la souveraineté dans le Monde Noir (kémit)

- Nouveaux matériaux théoriques sur la question Noire et ses retournements actuels comme assomption du destin de la vérité et de l'essence rédemptrice d'une humanité perdue

   Professeur Grégoire BIYOGO - Institut Cheikh Anta DIOP (ICAD) - Université Omar BONGO    Libreville (GABON)

 

    PARTIE 1 : PROLOGUE - HISTOIRE ET CULTURE DEMOCRATIQUE EN PAYS KEMIT

     A) PROLOGUE : Prolègomènes à tout examen de la question Noire et de la possibilité de la souveraineté de Kémit...

     De la dimension irrationnelle du dialogue avec l'Autre, Kémit ne paraît pas suffisamment avoir pris la réelle mesure. Pourtant, elle s'y est sans cesse aliénée, au moins depuis la Déportation survenue au milieu du XVème siècle, avec la Traite Négrière. Dès lors, la barbarie naguère masquée a rattrapé l'Occident conquérant, s'identifiant au Capital, au fer et à la Raison capitalisante. Fallait-il continuer de se ferrer dans ce joug rendu inexorable par l'histoire depuis la traite et Berlin ? Guère... A l'inverse, il convenait de ruiner la métaphysique de la capture qui en énonce la loi. Exorcisant l'histoire d'un malentendu cinglant entre Kémit et l'histoire. Car devenue par endroits le gueux de l'histoire, Kémit en était venue à l'amnésie de ses origines : Qu'elle est précisément mère de la Civilisation dont vit encore notre monde moderne. Ecrivant ses trois Livres de foi comme ceux de l'esprit savant et philosophique. Absolutiser cette sortie hors de la tyrannie de l'Autre, hors d'une humanité perdue, c' était alors détruire cette pensée conquérante. Détruire la grammaire de la soumission qui désapproprie toute altérité et l'économise en bien meuble. Cette économie générale de la servitude inscrite par l'Occident est ce dont le monde moderne a encore à se libérer définitivement. Car ici, inventer une humanité autre, c'est s'arracher à la torpeur séculaire avec laquelle le monde non-occidental a concédé sa défaite historique. Il est fondamentalement question, pour nous, de déracialiser l'homme et son écriture/lecture de la science, de la politique et de l'économie en vue de déployer l'humanité rédemptrice qui sommeille en Kémit, et à la vérité en toute humanité aux cultures antérieures... Telle est la demeure du philosophe et de l'égyptologue modernes, tous deux gardiens d'une humanité autrement perdue et d'une science autrement racialisée. Nulle souveraineté radicale ne peut se penser sans cette désaliénation de l'humanité occidentale et dans l'exorcisation de cette part de nous-mêmes qui désirerait encore se rattacher aux lubies de cette humanité perdue. Sans l'exorcisation de tout réflexe de servitude volontaire... Naguère mise en épochè, en hibernation, la question Noire nous force à nous regarder. A regarder la vilenie de l'humanité et la misère des pensées abjectes dont elle a vécu jusqu'ici. Sans avoir été examiné par MARX ni par SARTRE, la question Noire les rattrape au lieu où elle fait le procès du Capital et celui de l'existence même... Elle les rattrape et les déborde tout à la fois au lieu où elle invalide la sélection et la répudiation de l'humanité...

 Kémit, Gardienne de la vérité et rédemptrice d'une humanité perdue...

  Par ces temps obscurs où ce que l'on désignait naguère sous le nom d'humanité s'est violemment soustrait à tout impératif d'universalité / Et a été pris en flagrant délit dans la réduction occidentale de son énonciation, de son économie générale et de son destin historique. Par ces temps de désastre où la Coopération entre l'Euro-Amérique et l'Afrique est de plus en plus inégale, de plus en plus privatisée...Non ! cher ami, il ne nous reste pas autre chose à espérer de cet Autre. Mais plutôt à hater notre sortie hors de cette humanité de la Conquista, mécanisée et désontologisée qu'il a manifestée. Humanité perdue, sans la Maât (vérité juste)... Non pas comme l'a fait naguère HEIDEGGER, le philosophe de la forêt noire et du Rhin, qui entendait sortir de cette Europe vieillissante et en oubli de soi, ne différenciant plus entre l'Etre et l'Etant. Ruinant l'essence ontologique de la philosophie et de la politique. Mais le philosophe-Recteur devait comme par ironie se dérober lui-même à l'ordonnance qu'il instruisait au terme d'une sottise encore largement impensée par l'occident savant... Mais nous déshabituer de façon radicale de cette humanité-là comme on sort d'un tombeau après avoir vaincu la mort... Comme on se libère d'un vertige glacé... Nous reste à nous arracher irrémédiablement à cette servitude-là qui nous a durablement contraints à grimacer le non-Etre barrant la culture de l'Autre, et à répéter jusqu'à l'hystérie ce qui en lui n'est pas. A singer le reste sans consistance d'une humanité conquérante et autodestructrice. Or et nous le savons aujourd'hui, cher ami - cet Autre a à tout apprendre de nous, depuis la philosophie première, jusqu'à l'éthique et la théologie. Depuis la connaissance de la Matière. De la géométrie. Et la doctrine de la vérité. Et il n'est pas jusqu'à son écriture de l'histoire qui ne soit erronée et différentialiste. Ainsi de sa falsification grotesque de l'origine de la vie, du savoir et des sciences. Cet Autre dont CESAIRE dit qu'il s'est retourné en son propre Barbare a encore à apprendre de Kémit la Civilisation grandiose qu'il n'a jamais pu contempler... Pour avoir survécu à la Déportation de cinq siècles qui a décimé près de 200 millions d'êtres humains pendant la traite négrière - et dont le forfait demeure non qualifié juridiquement 150 ans après l'Abolition virtuelle de l' Esclavage ! ( la loi Taubira de 2001 met fin à cet ignominie ) Pour avoir vaincu récemment - au moins constitutionnellement - la discrimination qui nous moquait et nous battait à la fois aux USA et en Afrique du Sud, nous avons encore à libérer et à inventer cette humanité-à-venir. Humanité par essence rédemptrice qui nous porte et que nous portons. Humanité authentique que nous avons souvent manifestée en temps de péril, de persécution et de discrimination... en scandant des hymnes divins, aux accents venus de cet Ailleurs où habite et parle l'Etre. Opérant par inventions de survie... En écrivant authentiquement l'histoire de l'humanité, du savoir, de la vie et le nom propre de la science, Cheikh Anta DIOP nous y a - mais de  façon tonique - largement devancés, qui nous a installés sur le chemin de vérité que plusieurs d'entre nous continuent de chercher désespérément. Chercher cela qui est consigné dans leurs propres livres (tjaou). Comme aveuglés, alourdis par les philtres de l'oubli, et par les lésions interminables du long martyre qui sépara Kémit de Kémit. Cherchant fébrilement en balbutiant des paroles moribondes et misérables. Des mots sans visage. Cherchant comme on chercherait ce qui s'énonce sur son corps. S'accrochant à l'horizon réducteur d'un emprunt non critiqué. S'accrochant à des pensées spécieuses, paralogiques et sans héritage spirituel millénaire... Tombant dans l'abîme d'une modernité sans consistance ni Autre. Nom propre de l'anti-culture . Naguère, incendiant la Bibliothèque d'Alexandrie, l'envahisseur frappait de mutisme Kémit. Nous re-voila en saison du livre, de mémoire et de lucidité négative... Notre destin de souveraineté passera par ce Retour actif et critique à soi Par cette assomption du livre et de l'histoire. S'assumant soi-même, on revient à ce qu'on a pu être. A ce qu'on aurait pu être et qui a été obvié par les violences ressassées de l'Histoire... Notre destin de gardiens de l'humanité passera par la répudiation de l'humanité marchande, égarée et exclusive qui a surgi en Occident et en Orient pendant la Traite Négrière, dans l'Holocauste juive, et les génocides répétés sur les minorités cultivés...Mais d'abord par la répudiation de la part infâme qui nous pousse à singer l'Autre. A l'auto-servitude. Par l'irruption d'une Volonté autre. Ferme. De s'appartenir. Par l'avènement en nous d'une humanité juste. Sujet réel de la philosophie, de la politique, de la science et de la théologie. Entends cher ami, la clef de l'énigme : Kémit , tu n'es pas morte, Réveille-toi ! Car c'est de toi que naîtra l'invention que le monde ne connait pas encore mais qu'il espère comme l'humanité entière le Messie...C'est de toi-Kémit que viendra la libération totale des êtres enchainés. Car, tu as porté les chaînes du Capital et vaincu ses Enfers. En toi s'écrit la Rédemption de leur humanité perdue...Méditer (neka), voici ton ouvrage, veillant sur la science et sur l'humanité par le regard de justice et de vérité - qui tétanise toute aliénation...

 Ouverture...

 Pariant sur la lucidité et la pertinence dans l'analyse, et regardant l'événement exceptionnel de la démocratisation de l'Afrique comme on regarde à soi, m'enjeu de ce texte est de postuler une autre forme d'exigence. Celle de lire et de penser correctement l'événement démocratique par lequel advient la souveraineté d'un peuple ou d'un Etat. Gageant ainsi que de ne pas opérer cette lecture - de l'intérieur - c'est risquer de tomber dans une nouvelle forme d'amnésie : celle du présent, après celle du passé dont nous commençons seulement à sortir, avec l'égyptologue et physicien nucléaire africain, le professeur Cheikh Anta Diop. Ses travaux ont réorganisé l'historiographie africaine et l'histoire générale du savoir en un continuum où l'aventure de la vie commence en Afrique, dans la Région des Grands lacs, s'ouvre comme pensée et comme spiritualité en Ethiopie, et plus encore en Egypte où elle s'épanouit, avant de connaitre une autre forme de sommet et son déclin avec les Empires africains. Prendre ainsi le parti d'un questionnement sur le passé pour saisir le présent et anticiper sur le futur, c'est choisir de travailler à rectifier les discours reçus, les pseudo-théories légitimées par les pensées officielles, par le système universitaire dominant. Pourtant, ces idées fausses sont encore trop souvent tenues pour la vérité même. Dans cette perspective, se pencher sur la question démocratique, c'est chercher à faire avouer ce que celle-ci aurait encore à dissimuler, ou du moins voudrait tenir hors de toute clarté. Ce qu'elle préserverait encore hors de tout examen critique et qui fût cependant obscur. Pervers, tyrannique, et dont l'occultation aurait de bonnes raisons d'inquiéter profondément l'Afrique et sa Diaspora, en l'occurence par ses dérives et par ses compromissions inqualifiables. Or, la possibilité du changement de la situation de l' Afrique dans le monde moderne a partie liée avec le projet démocratique  entamé par le continent noir. En quoi il importe de l'examiner avec lucidité, sans complaisance ni exagération. Tâche fort ancienne qu'assumaient  les prêtres philosophes égyptiens, qui étaient soucieux d'interpréter correctement les signes du temps, qu'ils fussent enveloppés d'une bonne ou même d'une mauvaise augure. L'essentiel étant dans le questionnement incessant, sous le prisme de la vigilance critique et du postulat rectificationniste selon lequel la science progresse  par rectification de ses mauvais énoncés.

 Objets et enjeux...

 la démocratisation en cours dans les Etats africains - de même que les travaux innombrables qui en décrivent le processus - a perpétué trois erreurs : 1) pour s'instaurer, elle ne s'est pas appuyée sur l'histoire, la culture ni même sur la situation particulière de l'Afrique Noire et de sa Diaspora pour évaluer autrement l'ampleur des enjeux réels de la question démocratique ; séparant ainsi superficiellement entre le problème Noir tel qu'il s'est posé dans l'histoire et se pose encore dans le monde moderne d'une part, et de l'autre  la question démocratique qui aurait alors le configurer et à le contextualiser 2) Pas davantage la démocratisation n'a-t-elle localisé avec clarté la question de la souveraineté de l'Afrique comme la question centrale qui se joue dans cette affaire. Il s'agit de poser l'affranchissement de toute hégémonie économique et de toute sujétion politique comme l'un de ses véritables enjeux . Ici, le recours naturel aux observateurs " étrangers" irrévocablement lavés de tout soupçon et présumés receler une plus grande neutralité axiologique en la matière... est demeuré aussi récurrent que la critique unilatérale des Princes, perçus comme les nouveaux fossoyeurs des espérances nées des récentes Conférences Nationales africaines, après celles naguère avortées des Indépendances africaines. Cet affaissement des espoirs ayant lui-même un lien direct avec la contre-grammaire de la souveraineté écrite avec le découpage idéologico-économique de l'Afrique instruit par le Congrès de Berlin de 1885. 3) De même, le statut central et déviant de l'ethnie dans le jeu des équilibres instables et des ruses du pouvoir n'a -t-il pas suffisamment été pensé. Minorant ainsi la subversion qu'opère l'ethnie dans la lecture de notre modernité politique. De manière générale, ces trois points sont restés comme impensés, impensables même. Comme inquestionnés ou même inquestionnables, c'est-à-dire extérieurs au questionnement, et, à la vérité, par lui insoupçonnés. Or cela est connue, ni la conquête du pouvoir politique, ni même le fonctionnement régulier des institutions démocratiques ne se peuvent correctement penser sans une politique courageuse et lucide des ethnies - ou de la coalition raciale dans le cas de l'Amérique, de l'Afrique du Sud ou de l'Europe en cours - en inférant leur nécessaire intelligence de l'organisation et leur passage progressif et irréversible de l'ethnicité à la citoyenneté.  Ainsi convient-il de s'arrêter sur ces trois niveaux d'analyse dont l'occultation a durablement affecté le projet démocratique et a provoqué son retournement ironique en un véritable obstacle infranchissable : une démocratisation non arrimée aux enjeux de l'histoire et du destin culturel des peuples Noirs est toujours déjà altérée, dénaturée et menacée de trahison / une démocratisation sans contextualisation lucide de la question de la souveraineté économique et politique des Etats et du continent africain est irréaliste-irréalisable / une démocratisation désindexée à la définition d'une politique raisonnable des ethnies et de leur réconciliation sur la base d'un contrat à travers de nouvelles dynamiques intellectuelles, culturelles, économiques, politiques et théologiques est à l'avance condamnée. Une tele écriture/lecture de la Démocratie recule devant les questions essentielles dont dépend son propre avenir... Ainsi notre préoccupation n'est-elle pas seulement de montrer comment ces objets inquestionnés ont pu ruiner et invalider le processus de démocratisation, mais plus encore de répondre à la nécessité de les arrimer à toute pensée de la souveraineté et à une nouvelle intelligence de la compétitivité. Ce travail est donc une contribution à la re-formulation de ces problèmes en vue de revisiter la question démocratique en repensant sa corrélation avec le problème Noir ; la situation de l'Afrique et le rôle des instances financières ; et l'ampleur stratégique de la question ethnique. L'arracher à son anhistoricité, rectifier son universalisme abstrait, son juridisme (mise en place des institutions démocratiques sans l'effectivité de la pratique de leurs règles) et l'étroitesse de vue avec laquelle il entendait résoudre l'une des énigmes les plus radicales et les plus scabreuses de l'Afrique, et plus généralement de Kémit (l'Afrique et sa Diaspora). L'objet de ce texte consiste ainsi à donner une tout autre teneur, une autre consistance à l'idée même et à l'exercice démocratiques, tels qu'ils gagneraient à se déployer en Afrique. Ce réinvestissement du projet de démocratisation est somme toute tripartitionnel, qui passe par l'extension culturelle, historique et diasporique de ses inflexions et de ses enjeux, par une réévaluation lucide du rôle du filiationnisme égypto-nubien dans les analyses, et par l'élaboration d'une pensée de l'ethnie. Une telle conversion dans l'abord de la question démocratique devait permettre d'entendre son double enjeux : la conquête de la souveraineté des Etats Africains est inséparable de la libération du peuple Noir disséminé à travers la surface du globe. Et l'impératif de son redressement économique et technologique en vue de s'imposer comme puissance. Car dans le même temps où elle redevenait connaissable, institutionnalisable même, la démocratisation nous paraissait étrangère, parce qu'autrement aliénée. Dans le lieu où son histoire récente s'origine (vents de l'Est, discours de la Baule, et plus encore dans les mouvements insurrectionnels populaires en Afrique) , elle était à l'avance interdite, fondamentalement tronquée. Irrémédiablement manquée, si du moins elle ne devait pas se re-penser comme histoire de la réinvention de soi, comme culture de la résistance en situation et comme engagement économique et politique actif et raisonné, tourné vers notre propre émancipation de l'histoire. Mais la démocratisation a t-elle prononcé son dernier mot ? Rien n'est moins sûr, en cela, le propos du philosophe camerounais EBOUSSI-BOULAGA s'est avéré lucide, qui prévenait au sujet des Conférences Nationales en Afrique qu'elles recelaient quelque espérance, en dépit de leur caractère aléatoire et de l'apparente imperceptibilité de leur avancées . Mais pareille espérance ne doit pas occulter la complexité et l'extrême difficulté de la situation économique de l'Afrique et de son destin politique cernés par l'hétérogénéité de l'Occident. Car, au moment où l'Europe et l'Amérique se déclarent acquis à la démocratisation des régimes autoritaires africains issus - rappelons - le - de la Colonisation et du Congrès de Berlin dont elles ont été à l'origine, elles dévaluent en même temps le franc CFA. Ici le spectre du gorbachevisme plane. Que vaudrait en effet une démocratisation sans accompagnement économique et financier (endettement massif, guerres fraticides...?fût-elle volontariste, elle se heurterait fatalement aux impératifs économiques qui la déterminent, en ajustent le prix et préparent ici sa chute fatidique). Ainsi, plutôt que de contempler son essence libératrice et les virtualités de l'espérance démocratique, l'Afrique n'a-t-elle pu regarder que son visage vagabond, anti-émancipatoire, sa désespérance. Ce qui, on le sait, est mensonger. La démocratie est bien autre chose que ces pièges économiques et ces déchirements inconciliables qu'on a voulu faire voir à l'Afrique... Elle est autre chose que le chômage galopant, l'insécurité et la criminalité urbaines, la clôture de l'horizon du possible... C'est que, son enjeu véritable est de conquérir la souveraineté, d'instaurer la transparence dans la gestion des fonds et de la chose publique, mais aussi de multiplier les pôles d'investissement, de distribuer les bénéfices présumés par la croissance au milieu du  " plus grand nombre " ... Il importe donc de la prendre au sérieux, de s'y prendre autrement, en regardant de l'intérieur ce qui peut constituer en tel ou tel pli de son économie, la source d'un assainissement du climat politique en matière de Droits de l'homme, des libertés de grève, de presse et d'opinion... Et le facteur d'une relance de l'activité économique, notamment par un usage plus rationnel des ressources énergétiques dont regorge l'Afrique. Encore convient-il de rappeler que Kémit a connu, d'une manière ou d'une autre, la culture démocratique, celle qui fait valoir le primat de l'intérêt du plus grand nombre, intègre le principe de l'extension des compétences et de la formation en vue de la prospérité générale, de la sécurité territoriale, de la stabilité et de la puissance de l'Etat.

I. HISTOIRE ET CULTURE DEMOCRATIQUE EN PAYS KEMIT

    Les trois glorieuses (Ethiopie, Egypte, Empires Africains)  

          Les plus anciens Livres rapportent au sujet des Noirs d'Ethiopie (avec le système du gouvernement Atlandide) et d'Egypte (la gouvernance par le système des Mystères) que la gestion de la Cité se faisait sur le modèle de l'Etat Fédéral. Chaque Etat/Nome requérant une relative autonomie, mais demeurant relié à un pouvoir central qui en assurait l'unité, en garantissait la souveraineté et la puissance. Les pharaons dirigeaient le pays par l'entremise des sages qui conceptualisaient les lois et veillaient à leur application correcte... Ces sages et les prêtres travaillaient à la science (géométrie, astronomie, philosophie, théologie) Ils conseillaient d'autant plus les pharaons qu'ils menaient une vie vertueuse, surveillée, ascétique et méditative. De même, la justice sociale était-elle encore un impératif catégorique. En effet, principe d'essence cosmologique : la Maât désignait l'exigence de mener une vie recherchant l'équilibre de la vérité et de la justice contenue dans l'univers, la Maât devait par la suite, s'incarner dans la Cité, dans la vie pratique de chaque personne, et plus tard dans l'Amenti. Le Royaume des Morts, où Osiris, élevé à la droite du père (Rê) après sa Rédemption de l'humanité, devient le divin Juge, à côté de Thot et de la Maât. Il préside au Jugement dernier...L'exercice de la justice apparaît ainsi comme une nécessité cosmologique, politique et ontologique / harmonie des principes déjà inscrite dans le cosmos/Ordre et équilibre social correspondant à une science et aux institutions façonnées selon le modèle de l'unité du vrai et du juste/ vie spirituelle régentée par la quête du salut, la quête de l'éternité divine... En dépit de la division sociale fortement articulée (système des castes), le bénéfice des richesses profitait à tout le pays, il n'existait pas encore de gueux, ni de paria au milieu de Kémit, et qui f^t abandonné au hasard de l'histoire...L'Ethiopie, l'Egypte des pharaons et les Empires africains emblématisent largement le modèle de la prospérité, de la stabilité et de la puissance de l'Etat africain d'avant la Déportation des Noirs en Europe et en Amérique. On peut objecter ici que nous sommes encore dans des systèmes politiques de type monarchique où l'organisation des élections libres et transparentes est absente. Et que, au contraire serions -nous devant des pouvoirs dynastiques, reproduisant le Même (corps politique dynastique) sans variation, ni séparation des pouvoirs. Et que par conséquent, le peuple en aurait été la victime, qui n'était pas encore, au moins virtuellement, donné de conférer la légitimité du pouvoir dans l'Etat pharaonique. On aurait pas totalement tort. Mais ceci reste : l'Afrique, berceau monogénétique de l'humanité, était alors à l'age de gloire de sa philosophie, celle de l'invention du politique et de son projet éthique subséquent par une pensée forte, affirmée et actualisée : l'émancipation de l'homme et du monde par la science et par une philosophie attachée à la justice... Cette économie de l'émancipation de l'humanité - par Maât - était la grande préoccupation des prêtres philosophes. Mais une analyse plus attentive permet de conclure que la contradiction a pu s'exercer avec vigueur à l'intérieur de ces systèmes politiques Kémit qu'on eût cru inamovibles, immuables et intemporels. Or il n'en est rien. Cheikh Anta Diop décrit, à la suite de l'égyptologue PIRENNE un mouvement insurrectionnel radical, qu'il tient pour une révolution "osirienne" en Egypte, et que l'on s'accorde à situer vers la fin de la VI ème dynastie, notamment en 2100 avant notre ère. Pour contester la paralysie de l'Etat et la crise paroxystique qui déchirait alors l'économie Kémit (égyptienne), les insurgés de Memphis - capitale et sanctuaire d'Egypte - mettent la ville à feu, dépouillent les fortunes et les riches. Les jetant dans la rue, le mouvement s'étend jusqu'aux autres villes. Notamment à Saïs où 10 notables assurent la direction des affaires courantes... Puis ils prennent le contrôle du pays, renversent ad litteram le régime contesté. Le texte qui décrit cette révolution est dû au scribe IPOUSER, un égyptien de la classe nobiliaire, défendant ici un point de vue conservateur contenant la stupéfaction indignée des nobles renversés : " Ceux qui sont vêtus de lin sont battus (...) Les fonctionnaires sont tués, leurs écrits sont volés (...) le grenier du roi est à tout homme... La maison du roi, toute entière, n'a plus de revenus. Les lois de la salle de justice sont jetées dans le vestibule. On les piétine sur la place publique ; les pauvres les lacèrent dans la rue. Des choses arrivent qui n'étaient jamais advenues dans le passé : le roi est enlevé par les pauvres. Ce que cachait la pyramide est vide... Quelques hommes sans foi ni loi ont dépouillé la royauté...(...) Le luxe court le pays, mais ce sont les anciens pauvres qui possèdent la richesse. Celui qui n'avait rien possède la richesse. Celui qui n'avait rien possède des trésors et les grands flattent (...) Celui qui n'avait aucun domestique dispose de serviteurs.. " . Diop en conclut à juste titre à la nécessité de rectifier la thèse erronée et la position marxienne qui veulent qu'il n'y ait pas eu de contradiction radicale dans les Etats à MPA (Mode de Production Asiatique), capables de les mener à leur dissolution, par l'éclatement d'une révolution au terme de laquelle la classe opprimée renverserait les oppresseurs. Position proprement européocentriste qu'il importait de réfuter. Diop reconnait que le progrès technique ultérieur et la culture syndicale ont permis une meilleure coordination de l'action insurrectionnelle (1789/ Révolution française), 1917/Révolution russe), 1949/Révolution chinoise) Mais la Révolution, établit-il, ne se limite guère là :  "celle-ci éclate partout, mais la théorie, ne pouvant expliquer son insuccès, à préféré l'ignorer, en refusant de prendre en compte les authentiques révolutions non réussies ".Fait frappant, c'est encore en Egypte que l'exercice du pouvoir par le  "peuple" a historiquement eu lieu, notamment en 2100 avant notre ère . Sans doute ne devait-il jamais plus se répéter dans l'histoire autrement que dans les termes de sa confiscation par la classe  " éclairée " ou même de sa manipulation... Car l'essentiel n'est là , dans l'accès au pouvoir par le verdict des urnes (celui du plus grand nombre des citoyens), mais encore dans la garantie que les nouveaux gouvernants peuvent être déposés dès qu'ils viendraient à trahir le contrat des électeurs. Cette théorie de la déposition que développe admirablement Karl POPPER est précieuse et nouvelle, qui déplace les catégories traditionnelles de la philosophie politique. En effet, la question essentielle n'est plus celle posée naguère par PLATON : quel est le bon gouvernant ? ni même celle novatrice formulée par MACHIAVEL, et qui s'apparente à une essence physique : à quelle condit ion le Prince peut-il s'assurer le plus longtemps possible du maintien au pouvoir ? Ce n'est plus la question rousseauiste du contrat ou marxiene du renversement de la bourgeoisie par le prolétariat. La question centrale d'abord celle Kantienne de la conquête de l'autonomie et de la souveraineté. Tel est le fin mot de la question Noire. L'exigence de transparence des instances de la République est ainsi inséparable de l'émergence d'une gestion rigoureuse, d'une économie compétitive préservant le niveau de vie général du  " plus grand nombre ". C'est seulement ainsi que le désir démocratique se donne un sens, en tant qu'il s'exprime dans un Etat attaché aux conditions de vie et aux libertés des Citoyens, au principe d'égalité - non pas par une  réduction formelle , à la sécurité du territoire et à la puissance de l'Etat. Or, les élus constituent bien vite des lobies financiers et technologico-médiatiques  détenant et concentrant l'économie, les moyens d'information, les milices privées et contrôlant le pôle de décision... De plus, l'appartenance à un milieu social/ethnique privilégié semble t-elle conditionner l'àccès à certaines compétences, à certaines fonctions par un processus interminable de reproduction de l'hégémonie du Même - selon la terminologie bourdieusienne. La démocratie est inséparable de l'égalité de chances dans la formation, l'emploi, les soins, la promotion sociale, la consécration dans les institutions du savoir... C'est en quoi nous nous reconnaissons davantage dans l'institution de type démocratique que dans la gestion identitaire et sectaire des pouvoirs dynastiques intemporels, sécularisant le savoir et la Loi par le sacré... Pour ce qui est de l'Afrique, le déclin historique de son rayonnement correspond à trois conquêtes consécutives : la conquête de l'Ethiopie, les 7 conquêtes de l'Egypte et plus encore, la conquête des Empires glorieux de l'Afrique Noire par une Europe qui allait tirer parti de près de cinq siècles de Traite négrière (1458-1848/1900) pour édifier le capitalisme européen et le Nouveau monde. En somme, Kémit , le peuple le plus ancien de l'humanité (Kémit) naît avec l'apparition même de l'Omo dans l'actuel Kénya. Le premier grand Etat qu'il bâtit est l'Ethiopie qui , elle-même invente l'Etat, la religion et l'écriture hiéroglyphique. De l'Ethiopie - encore nommée Nubie ou Abyssinie - les premiers grands prêtres Noirs vont transporter les édifices de la civilisation dans la vallée du Nil où émergera une très brillante civilisation. Notamment avec NARMER, premier Roi d'Egypte, l'homme aux deux couronnes, - le MENES des Grecs - à qui nous devons entre autres merveilles la ville de Memphis, première capitale du pays, qu'il a édifiée pour immortaliser l'unification des deux Egyptes (la Basse Egypte avec le Delta et la Haute Egypte avec la prestigieuse Vallée du Nil) C'est cette Vallée qui a vu naître la philosophie, la théologie, la géométrie, la médecine, la plastique et l'architecture solaires, et ,ici, les premiers rudiments modernes de l'Etat. L'Egypte, cette seconde terre de Kémit abrite 31 dynasties (3300-525 av J-C) dont les inventions et les découvertes scientifiques sont prodigieuses. On sait que les Noirs vont enfin instruire la troisième grande civilisation avec les glorieux empires, en Afrique de l'Ouest avec l'empire de Ghana, l'Empire du Mali et le Manding éternel, l'Empire du Songhaï, l'Empire de Kanem Bornu, l'Empire du Bénin...et les Royaumes d'Afrique Centrale, dont le célèbre Royaume Kongo... Naguère donc, selon toute attestation archéologique et linguistique, Kémit (l'Afrique et le monde Noirs) était maître du monde, et a conquis le titre de première puissance politique, intellectuelle et spirituelle. Celui de gardien du savoir et de la mémoire du reste de l'humanité. Athènes fut alors fondée par une colonie de Noirs égyptiens que dirigeaient CECROPS. C'est alors que l'agriculture et la métallurgie furent introduites en Grèce continentale, selon les dépositions des Grecs eux-mêmes, notamment pendant la XVIII ème dynastie, vers le XVI ème siècle avant J-C. Ailleurs, nous montrons que la philosophie, l'astronomie, la médecine, la géométrie et la théologie furent des inventions des prêtres égypto-nubiens avant que ceux-ci ne consentissent à instruire leurs élèves les premiers penseurs Grecs qui ont visité l'Egypte pendant plusieurs années (notamment SOLON, THALES, DEMOCRITE, HIPPOCRATE, PYTHAGORE, PLATON...) Sur le plan strictement politique, retenons donc ceci : l'invention attestée des premiers textes de droit, de politique, d'éthique et de métaphysique... Notamment la doctrine de la Maât, théorie de la justice sociale et de la recherche d'un modèle d'Etat attaché à la vérité/justice. Et d'un modèle de science accordant le vrai et le juste. C'est de cette doctrine que PLATON tirera le modèle  d'une Cité idéale gouvernée par les sages... C'est elle qui constitue l'essence du politique et de la science. Encore que cette stabilité postulée par Kémit ait été violemment ébranlée par les persécutions et par la déportation qui allaient frapper l'Afrique... (à suivre)   

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